Pour bon nombre d’agriculteurs ontariens, la saison 2021 s’est déroulée en montagnes russes en ce qui a trait à la météo. Dans une grande partie de la province, le début de la saison a été extrêmement sec, avec à certains endroits moins de 20 % des précipitations normales pour le mois de mai (figure 1). Vers la fin juin, des précipitations régulières qui se sont poursuivies en juillet ont apporté un certain soulagement dans de nombreuses régions du sud de l’Ontario. Ailleurs par contre et en particulier dans certains coins des comtés de Kent et d’Essex, les précipitations ont été excessives, faisant passer rapidement les conditions de trop sèches à trop humides. D’autres parties de la province ont continué à subir d’importants déficits en eau.
Le sud de l’Ontario a connu d’autres saisons difficiles ces dernières années, notamment du temps extrêmement sec en 2016 et des printemps très humides en 2017 et 2019. Chaque épisode, comme en 2021, nous a démontré l’importance d’avoir des sols résilients. En effet, de tels sols permettent la présence de systèmes culturaux résilients, qui donnent des rendements plus élevés et plus constants et qui sont mieux en mesure de « plier sans casser » en raison du stress.
Les sols ne se comportent pas tous de la même manière
La résilience d’un sol dépend en partie de sa texture et de ses conditions de drainage naturelles. Les sols à texture fine, comme les argiles, contiennent de nombreux pores très petits qui permettent une meilleure conservation de l’eau, mais qui retiennent une partie de l’eau trop étroitement pour qu’elle soit accessible aux racines. Ces sols ont aussi tendance à se drainer très lentement. Les pores des loams et des loams limoneux sont de dimensions variées, et contiennent de nombreux pores de taille moyenne qui permettent un drainage modéré et gardent beaucoup d’eau disponible pour les plantes. Ces types de sols ont tendance à être plus résilients que les sols argileux ou sableux. Il est important de reconnaître ces limitations naturelles.
Pratiques de gestion pour une meilleure résilience
Les pratiques particulières recommandées pour favoriser le plus possible la résilience diffèrent selon le climat, le type de sol et d’exploitation agricole. Certaines pratiques courantes s’appliquent toutefois à l’ensemble des fermes pour arriver à obtenir des sols plus résilients. Les prérequis à cette fin sont un bon drainage et un sol fertile. Un drainage souterrain pour les sols qui se drainent mal naturellement, l’épandage de chaux pour les sols acides, et un apport suffisant d’éléments nutritifs pour la croissance des cultures sont donc nécessaires. En présumant que le drainage et la fertilité du sol sont appropriés, les pratiques de gestion optimales (PGO) suivantes sont le plus importantes à appliquer pour améliorer la résilience d’un système cultural.
Diversifier les rotations culturales et réduire le travail du sol
Une récente étude nord-américaine a été réalisée en vue de comparer des rotations culturales simples à des rotations complexes dans un ensemble de 11 essais à long terme (dont deux en Ontario). Les résultats ont montré que les rendements en maïs étaient, en moyenne, de 28 % supérieurs dans le cas des rotations plus diversifiées par rapport aux rotations simples (1 à 2 cultures) [1]. Au cours des saisons de sécheresse, les pertes de rendement dans le maïs ont diminué de 14 à 90 % dans le cas des rotations diversifiées. Les risques de mauvaises récoltes étaient également beaucoup plus faibles à 8 sites sur 11.
Plus près de chez nous, l’analyse de données climatologiques et de rendement, issues d’essais de l’Université de Guelph sur 31 ans concernant le travail du sol à long terme, et d’essais sur les rotations à Elora, a montré une plus grande stabilité dans les rendements du maïs et du soya lorsque des cultures de céréales à paille étaient ajoutées à la rotation [2]. L’effet a été particulièrement marqué au cours des saisons chaudes et sèches, où l’ajout de céréales à paille, combiné à un travail du sol réduit, a augmenté les rendements de maïs et de soya de respectivement 7 et 22 %. L’ajout de blé et de trèfle rouge a considérablement accru la stabilité des champs de soya durant les années de sécheresse.
Maintien des apports en carbone
Le fait de laisser les résidus de culture sur le sol contribue de manière importante à l’obtention de sols résilients. Ces résidus aident à maintenir la matière organique du sol, favorisant ainsi la conservation de l’eau et l’amélioration du drainage. Laissés à la surface du sol, les résidus améliorent aussi l’infiltration d’eau et réduisent l’évaporation par temps chaud et sec.
Une étude effectuée récemment au Nebraska a montré qu’en retirant 50 % des tiges de maïs dans un système de monoculture, on a réduit de 32 % l’eau disponible pour les plantes et diminué considérablement l’infiltration d’eau après 5 ou 6 ans (3). La quantité de matière organique dans le sol a également baissé. Bien que ce soit un exemple extrême, les résultats mettent en évidence l’effet possible du retrait des résidus sur la résilience du sol. En effet, le sol en question ici absorbe maintenant l’eau plus lentement et en procure moins à la culture en croissance. L’ajout de seigle céréalier comme culture de couverture dans le cadre de l’étude a été utile, mais n’a pas entièrement compensé les effets négatifs.
Les résidus de culture sont souvent tenus pour acquis, mais il reste qu’ils jouent un rôle crucial dans le maintien de la résilience des sols.
Exemple ontarien
La carte de rendement ci-dessous (figure 3) montre comment les principes décrits plus ci-dessus ont donné des résultats sur une ferme ontarienne réelle au cours de la saison 2016 qui fut très chaude et sèche. Les rendements de soya ont été nettement plus élevés dans la partie ouest de la ferme, dans un sol argileux lourd. Le tiers à l’est de la carte représente une section de la ferme achetée en 2008 qui avait été en monoculture de soya et dont le sol avait été labouré selon des méthodes traditionnelles. Les deux tiers Ouest ont été cultivés pendant des années avec une rotation maïs-soya-blé (en culture de couverture) avec travail minimum du sol dont la fertilité était adéquate. La carte fournit un exemple convaincant de résilience du sol, de la manière dont on peut la renforcer avec le temps et des résultats qui lui sont associés au cours d’une saison difficile.
Références
Bowles, T.M., Mooshammer, M., Socolar, Y. …, Schmer, M.R., Strock, J., A. Stuart, G., Long-Term Evidence Shows that Crop-Rotation Diversification Increases Agricultural Resilience to Adverse Growing Conditions in North America, One Earth (2) 284-293., 2019.
Gaudin ACM, Tolhurst TN, Ker AP, Janovicek K, Tortora C, Martin RC, et coll., Increasing Crop Diversity Mitigates Weather Variations and Improves Yield Stability. PLOS ONE 10 (2): e0113261, 2015.
Sindelar, M., Blanco-Canqui, H., Jin, V.L., Ferguson, R., Cover Crops and Corn Residue Removal: Impacts on Soil Hydraulic Properties and Their Relationships with Carbon. Soil Science Society of America Journal. 83:221-231, 2019.
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For many Ontario farmers, the 2021 season has been a weather roller coaster. Throughout much of the province, the season started out extremely dry, with some regions receiving less than 20% of normal precipitation for the month of May (Figure 1). Late June brought relief for many parts of Southern Ontario, with regular rainfall that continued throughout July. Some areas, however, in particular parts of Kent and Essex counties, received excessive rainfall and quickly went from too dry to far too wet. Other parts of the province continued to experience serious water deficits.
For many Ontario farmers, the 2021 season has been a weather roller coaster. Throughout much of the province, the season started out extremely dry, with some regions receiving less than 20% of normal precipitation for the month of May (Figure 1). Late June brought relief for many parts of Southern Ontario, with regular rainfall that continued throughout July. Some areas, however, in particular parts of Kent and Essex counties, received excessive rainfall and quickly went from too dry to far too wet. Other parts of the province continued to experience serious water deficits.
We have experienced other challenging seasons recently in southern Ontario, including extremely dry weather in 2016 and very wet springs in 2017 and 2019. Each of them, like 2021, have provided lessons in the importance of resilient soils. Resilient soils result in resilient cropping systems, which produce higher, more consistent yields and are better able to bend without breaking under stress.
Not all soils are alike
A soil’s resiliency is in part determined by its texture and natural drainage. Fine-textured soils, such as clays, contain many very small pores which contribute to high water storage, but hold some water too tightly to be accessed by roots. They also tend to drain very slowly. Loams and silt loams have a variety of pore sizes including many medium-sized pores, which drain moderately and store lots of plant available water. These soil types tend to be inherently more resilient than clays or sands. It’s important to recognize these natural limitations.
Managing for resilience
While the specific set of practices that work best vary by climate, soil type and farm operation, there are a common set of practices that will serve any farm well in building more resilient soils. Adequate drainage and soil fertility are prerequisites. That means subsurface drainage for soils with poor natural drainage, lime application to address soil acidity and sufficient nutrients provided for crop growth. Assuming drainage and fertility have been addressed, the following best management practices (BMPs) are at the top of the list to improving cropping system resilience
Diverse crop rotations and reduced tillage
A recent North America-wide study compared simple crop rotations to complex crop rotations from a group of 11 long-term trials (including two in Ontario). They found that corn yields were, on average, 28% higher in the most diverse rotations compared to the simple (1-2 crop) rotations (1). In drought years, corn yield losses were reduced by 14-90% in more diverse rotations; there was also a much lower risk in crop failure at 8/11 trial sites.
Closer to home, analysis of yield and weather data from 31 years at the University of Guelph’s long-term tillage and rotation trial at Elora found greater yield stability for corn and soybeans when small grains were added to the rotation (2). The effect was especially dramatic in hot and dry seasons, where the addition of a small grain, combined with reduced tillage, increased corn and soybean yields by 7 and 22%, respectively. The addition of wheat and red clover dramatically increased the stability of soybean yields in droughty years.
Maintenance of carbon inputs
Retaining crop residues also plays a critical role in building resilient soils. They help to maintain soil organic matter, which provides both water storage and improved drainage. When left on the soil surface, residue further enhances water infiltration and reduces evaporation during hot, dry weather.
A recent study in Nebraska found that 50% corn stover removal in a continuous corn system reduced plant available water by 32% and significantly reduced water infiltration after 5-6 years (3). The practice also lowered soil organic matter. Although an extreme example, it highlights the impact that residue removal can have on soil resilience – that soil now takes in water more slowly and provides less to growing crops. The inclusion of a cereal rye cover crop in the study was helpful but did not fully offset the negative effects.
While crop residues may sometimes be taken for granted, they play a critical role in helping to maintain resilient soils.
The yield map below (Figure 3) shows how the principles above played out on a real Ontario farm in the hot, dry 2016 season. Soybean yields were drastically higher on the western portion of the farm for this heavy clay soil. The eastern third of the map represents a section of the farm that was purchased in 2008 and had a history of continuous soybeans with conventional tillage. The western two-thirds were managed for years in a corn-soybean-wheat (cover crop) rotation with minimum tillage and adequate fertility. This map provides a powerful example of soil resilience, how it can be built over time and the results it provides in a challenging season.
References
Bowles, T.M., Mooshammer, M., Socolar, Y. …, Schmer, M.R., Strock, J., A. Stuart, G. (2019) Long-Term Evidence Shows that Crop-Rotation Diversification Increases Agricultural Resilience to Adverse Growing Conditions in North America. One Earth (2) 284-293.
Gaudin ACM, Tolhurst TN, Ker AP, Janovicek K, Tortora C, Martin RC, et al. (2015) Increasing Crop Diversity Mitigates Weather Variations and Improves Yield Stability. PLOS ONE 10 (2): e0113261.
Sindelar, M., Blanco-Canqui, H., Jin, V.L., Ferguson, R. 2019. Cover Crops and Corn Residue Removal: Impacts on Soil Hydraulic Properties and Their Relationships with Carbon. Soil Science Society of America Journal. 83:221-231.