Gestion des graminées remontantes et non remontantes
Christine O’Reilly, spécialiste de la culture des fourrages et des animaux de pâturage, MAAARO
Les graminées ne poussent pas miraculeusement et ce ne sont pas toutes les espèces qui le font de la même manière. Comprendre comment les différentes espèces de graminées croissent permet aux producteurs de prendre des décisions judicieuses en vue de maximiser la production de fourrages dans leurs champs de foin et leurs pâturages. Les graminées remontantes et non remontantes réagissent différemment à la fauche, ce qui a un effet direct sur la productivité et la persistance de la culture.
Dans une parcelle établie, les plants de graminées ne comportent pas une seule tige, ils ont au contraire de nombreuses talles (tiges secondaires). Un seul plant de graminée peut avoir des douzaines de talles naissant à partir de points de croissance (ou point végétatif) à la base du plant. La présence du point de croissance à la base du plant représente une adaptation évolutive, puisqu’elle protège la graminée du broutage, étant donné que la plupart des animaux ne peuvent pas brouter aussi près du sol et endommager ainsi ce point de croissance.
Durant la croissance végétative, les feuilles poussent vers le haut à partir de la base des talles. Puis, pour toutes les graminées, la montaison (ou élongation de la tige) se produit pour préparer le plant à la floraison et à la grenaison. La tige (ou chaume) est faite de nœuds séparés par des entre-nœuds. Chaque nœud et son entre-nœud correspondent à un segment de la tige. Techniquement, toutes les espèces de graminées sont des espèces remontantes puisqu’elles produisent toutes des tiges florifères à la suite de l’élongation des espaces entre les nœuds. Les qualificatifs de « remontante » ou « non remontante » désignent en fait le type de repousse de l’espèce de graminée une fois que l’épi est enlevé.
Lorsque les espèces remontantes repoussent après la floraison, une nouvelle élongation de la tige se produit. Dans leur cas, le point de croissance se situe au-dessus du segment nœud/entre-nœud le plus récemment formé, ce qui signifie qu’à mesure que l’élongation de la tige progresse, le point de croissance s’élève dans le plant. Les graminées remontantes sont facilement endommagées si le point de croissance est fauché ou brouté au mauvais moment. La défoliation sera moins dommageable pour les espèces remontantes si elle survient soit durant le tallage quand le point de croissance est bas, ou entre le stade du gonflement (fin montaison) et le début de l’épiaison. Si les graminées sont récoltées durant la montaison, la nouvelle pousse doit naître à partir de la couronne du plant et utiliser les réserves d’énergie des racines, comme cela se produit lorsque le plant sort de l’état de dormance au printemps. Cette situation cause un stress majeur au plant de graminée. Si l’on attend jusqu’au stade du gonflement pour faucher, la couronne a le temps de former des talles additionnelles qui vont assurer la repousse. Du moment que la fauche se fait au bon moment, les graminées remontantes peuvent être fauchées aussi court que 5 à 7,5 cm (2 à 3 po) sans réduire le potentiel de rendement ou la persistance de la culture. La fléole des prés (mil), le brome inerme, l’alpiste roseau et le ray-grass d’Italie (annuel) sont des graminées remontantes.
Lorsque des espèces non remontantes sont fauchées après la floraison, la repousse demeure au stade végétatif et très peu de talles vont connaître une nouvelle montaison durant la saison de croissance. Les points de croissance des graminées non remontantes demeurent près du sol. Ces points sont donc plus difficilement fauchés ou broutés et la repousse des feuilles peut se faire plus rapidement que dans le cas des espèces remontantes. Une fauche moins basse ou une gestion du broutage permettant de laisser une portion adéquate du plant au-dessus du de la base des tiges protègent les points de croissance et la productivité des graminées non remontantes. Le dactyle pelotonné, la fétuque élevée, la fétuque des prés, le pâturin des prés et le ray-grass vivace sont des graminées non remontantes. La fétuque des prés, le pâturin des prés et le ray-grass vivace vont tolérer une coupe jusqu’à 5 cm (2 po), mais le dactyle pelotonné est plus productif si on laisse les plants après la fauche à une hauteur de 7,5 à 10 cm (3 à 4 po).
La gestion devient plus compliquée lorsqu’on mélange des espèces remontantes et non remontantes. Les graminées non remontantes conviennent mieux aux pâturages, puisque le point de croissance est mieux protégé et que la repousse végétative est plus appétente pour les animaux qui les broutent. Les espèces remontantes et non remontantes peuvent toutes deux être récoltées pour être entreposées. Il se peut qu’il n’y ait pas vraiment de moment où toutes les espèces remontantes dans un mélange arrivent simultanément au stade voulu pour la récolte, il faut donc que les exploitants surveillent étroitement le stade de croissance de chaque espèce pour décider laquelle ils privilégient. Des fauches répétées à un stade de croissance vulnérable finiront par éliminer l’espèce de la parcelle.
Sources
National Forage & Grasslands Curriculum, Discuss the basics of grass growth, Oregon State University, 2008. Extrait du site https://cpb-us-e1.wpmucdn.com/blogs.cornell.edu/dist/e/1628/files/2016/03/basics-of-grass-growth-rrn30f.pdf
Oregon State University, date inconnue, Jointing and Non-jointing Grasses. Extrait du site https://forages.oregonstate.edu/regrowth/how-does-grass-grow/grass-types/jointing-and-non-jointing-grasses
Pierce Conservation District, date inconnue, How Plants Grow. Extrait du site https://piercecd.org/163/How-Plants-Grow
Thomas, B., Managing Pasture for Better Yields and Quality [Présentation], Profitable Pastures Conference, Ontario Forage Council, Mount Forest, Ontario, 10 mars 2020.
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Christine O’Reilly, Forage and Grazing Specialist, OMAFRA
Grass doesn’t just happen and not all species grow the same way. Understanding how different grass species grow enables producers to make good management decisions that maximize forage production in their hay fields and pastures. Jointing and non-jointing grasses respond differently to cutting, which directly affects productivity and persistence.
In an established stand, grass plants are not made up of a single stem but have many tillers. One grass plant may have dozens of tillers which arise from growing points at the base of the plant. Having the growing point at the base of the plant is an evolutionary adaptation because it protects the grass from grazing, since most animals cannot graze so close to the ground as to damage this growing point.
During vegetative growth, leaves are pushed upward from the base of the tillers. Then all grasses begin stem elongation in preparation to flower and set seed. The stem, or culm, consists of nodes separated by internodes. Each node with its associated internode is a stem segment, commonly called a joint. Technically, all grass species are jointing species because they all put up flowering stems by lengthening the internodal spaces. The designation of “jointing” or “non-jointing” refers to how the grass regrows once the seed head is removed.
When jointing grass species regrow after flowering, they go through stem elongation again. Jointing grasses have their growing point above the newest completed joint, which means that as stem elongation progresses, the growing point rises. Jointing grasses are easily damaged if the growth point is cut or grazed off at the wrong time. Defoliation will be least damaging to jointing species if it occurs either during tillering when the growth point is low, or between boot and early heading. If the grass is harvested during stem elongation, new regrowth must start from the crown of the plant and use energy reserves from the roots – just like when the plant breaks dormancy in the spring. This is a significant stress on the grass. By waiting until boot stage, the crown has time to develop additional tillers that will provide regrowth. So long as the timing is correct, jointing grasses can be cut as low as 5-7.5 cm (2-3 in.) without reducing yield potential or persistence. Jointing grass species include timothy, smooth brome, reed canarygrass, and Italian (annual) ryegrass.
When non-jointing species are cut after flowering, the regrowth remains in the vegetative state, and very few tillers attempt stem elongation again during the growing season. The growing points of non-jointing grasses remain close to the ground. It is more difficult to cut or graze off these growing points and leaf regrowth can occur faster compared to jointing species. Keeping the cut height or target grazing residual above the stem base protects the growing points and productivity of non-jointing grasses. Non-jointing grass species include orchardgrass, tall fescue, meadow fescue, Kentucky bluegrass, and perennial ryegrass. While meadow fescue, Kentucky bluegrass, and perennial ryegrass will tolerate defoliation down to 5 cm (2 in.), orchardgrass is more productive if 7.5-10 cm (3-4 in.) of residuals is left.
Mixing jointing and non-jointing species together makes management more complicated. Non-jointing grasses are better suited for pastures, as the growth point is better protected, and the vegetative regrowth is more palatable to grazing animals. Either jointing or non-jointing species can be harvested for stored forage. There may not be a time when all jointing species in a mixture are at the same optimal stage for harvest, so grass managers need to closely monitor the growth stage of each species and decide which to favour. Repeated cutting at a susceptible growth stage will push a grass species out of the stand.
Sources:
National Forage & Grasslands Curriculum. 2008. Discuss the basics of grass growth. Oregon State University. Retrieved from: https://cpb-us-e1.wpmucdn.com/blogs.cornell.edu/dist/e/1628/files/2016/03/basics-of-grass-growth-rrn30f.pdf
Oregon State University. Date Unknown. Jointing and Non-jointing Grasses. Retrieved from: https://forages.oregonstate.edu/regrowth/how-does-grass-grow/grass-types/jointing-and-non-jointing-grasses
Pierce Conservation District. Date Unknown. How Plants Grow. Retrieved from: https://piercecd.org/163/How-PlantsGrow
Thomas, B. 10 March 2020. Managing Pasture for Better Yields and Quality [Presentation]. Profitable Pastures Conference, Ontario Forage Council. Mount Forest, ON.